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Giovanni Antonio Sogliani St John the Baptist ca. 1515-20 drawing Kupferstichkabinett, Staatliche Museen zu Berlin |
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Karl Blechen Upper Terrace at Sanssouci Palace, Potsdam ca. 1832-34 oil on paper, mounted on canvas Alte Nationalgalerie, Staatliche Museen zu Berlin |
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Gerhard Richter Sheik with Woman 1966 oil on canvas Von der Heydt Museum, Wuppertal |
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Stephan Bundi John Lurie - Lounge Lizards 1989 screenprint (poster) Museum Folkwang, Essen |
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Christopher Paudiss Portrait of a Young Man ca. 1660-62 oil on panel Kunsthistorisches Museum, Vienna |
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Heinrich Campendonk The Painter in the Country 1917 oil on canvas Von der Heydt Museum, Wuppertal |
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Claude Monet L'Allée des Rosiers, Giverny ca. 1920-22 oil on canvas Musée Marmottan Monet, Paris |
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Jean-Baptiste-Camille Corot The Birch 1870 oil on canvas Musée des Beaux-Arts de Marseille |
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Alexandre Marcette Bas Escaut 1906 watercolor and gouache on paper Musée des Beaux-Arts de Reims |
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Johan Christian Dahl Cloud Study 1832 oil on paper Nasjonalmuseet,Oslo |
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Fernand Léger Study for Three Portraits 1910-11 oil on canvas Milwaukee Art Museum |
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Ivan Galuzin and Oleg Samoilov 7/10-43 Photo-reconstruction 2015 C-print Nordnorsk Kunstmuseum, Tromsø |
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James Ensor Masquerade 1889 oil on canvas Royal Museum of Fine Arts, Antwerp |
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Robert Delaunay Fenêtres sur la Ville 1914 encaustic on cardboard Lenbachhaus, Munich |
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Edgar Degas Three Dancers ca. 1898 pastel on paper Ordrupgaard Art Museum, Copenhagen |
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Eugène Brands Summer Haiku 1980 oil on canvas Dordrechts Museum |
C'était un joker, comprenez-vous? Cette peinture était un joker à jouer dans un moment crucial: si Robespierre prenait définitivement le pouvoir on produirait le tableau au grand jour comme preuve éclatante de sa grandeur et de la vénération qu'on avait toujours eue pour sa grandeur; on dirait hautement qu'on avait commandé en secret le tableau pour en faire hommage à sa grandeur, et au grand rôle qu'on lui destinait; et on lui dirait clairement qu'on était avec lui, qu'on avait tenu à honneur d'apparaître à ses côtés. On ferrait jouer l'alibi fraternel. Si au contraire Robespierre chancelait, s'il était à terre, on produirait aussi le tableau, mais comme preuve de son ambition effrénée pour la tyrannie, et on prétendrait effrontément que c'était lui, Robespierre, qui l'avait commandé en sous-main pour le faire accrocher derrière la tribune du président dans l'Assemblée asservie, et être idolâtré dans le palais exécré des tyrans. Ainsi cette peinture, Le Grand Comité de l'An II siégeant dans le Pavillon de l'Égalité, comme elle devait originellement s'appeler, soudain publiée serait un flagrant délit de pouvoir – une scène du crime, si vous voulez. Voilà le pourquoi des Onze. Eh oui, Monsieur, le tableau le plus célèbre du monde a été commandé par le lie de la terre avec les plus mauvaises intentions du monde, il faut nous y faire.
J'ajoute ceci; dans l'un et l'autre cas, mise à mort ou apothéose de Robespierre, il fallait que le tableau fût juste, fonctionnât; que Robespierre et les autres pussent y être vus comme des Répresentants magnanimes, ou comme des tigre altérés de sang, selon que les faits exigeassent l'une ou l'autre lecture. Et que Corentin l'ait peint et réussi dans ce sens, dans les deux sens, voilà bien sans doute une des raisons pourquoi Les Onze sont dans la chambre terminale du Louvre, le saint des saints, sous le vitre blindée de cinq pouces.
– Pierre Michon, from Les Onze (Verdier, 2009)